Sammy Stein est un chercheur. Auteur, éditeur, fabricant, il explore dans toutes ces taches des voies graphiques, plastiques et narratives inattendues. Distribuer un seul de ses livres, c’est entrouvrir une porte donnant accès à de multiples mondes. Cette ouverture n’est qu’un interstice. Mais il est possible d’y passer
un œil, puis quelques doigts qui, espérons-le, ne seront pas écrasés mais serviront au contraire de levier…
On espère que vous saurez-vous débrouiller.
Peux-tu te présenter ?
Nous parler dans les grandes lignes de tes activités ?
Je partage mon temps entre plusieurs activités qui sont aussi distinctes que poreuses.
Je dessine et écrit pour en faire des livres, la plupart du temps des bandes dessinées qui prennent différentes formes ( faux catalogues d’exposition, fictions… )
Ces fascicules, zines, livres, éditions sont souvent liés au contexte de création: résidence, exposition, invitation etc. J’y reviendrai pour parler de VISIONS. En ce moment, je mène un projet de livre en céramique à la Villa Belleville en duo avec Séverine Bascouert. Je dessine aussi des illustrations pour des revues ou des musées, je donne des cours et je fais des workshops en école d’art.
Il y a une dizaine d’années, j’ai cofondé la revue COLLECTION avec plusieurs ami•e•s artistes, designers graphiques ( Vanessa Dziuba, Julien Kedryna, Jean–Philippe Bretin, Antoine Stevenot ). Son protocole actuel est simple : nous rencontrons des artistes, éditeurs, designers, autrices, auteurs, des gens liés
à l’image et leur accordons une interview qui se déroule sur 32 pages. 16 pages noir & blanc pour le texte et 16 pages couleurs pour les images.
Il y a six ans, j’ai cofondé ( avec Séverine Bascouert, Alexis Beauclair, Bettina Henni, Jean–Philippe Bretin ) une autre revue, LAGON qui est portée par la bande dessinée, la narration. Deux axes principaux régissent le projet. Tout d’abord, une sélection d’artistes, d’autrices, d’auteurs pointus et internationaux qui abordent le médium d’une manière singulière. De l’autre côté, l’impression des livres pour laquelle nous cherchons des encres spéciales, de nouveaux papiers, des manières d’imprimer spécifiques dans le but de magnifier les pages réalisées spécialement pour la revue. D’abord imprimé et réalisé entièrement par nos soins, le projet a évolué mais continue d’avoir une part d’artisanat – notamment la sérigraphie. Nous effectuons nous-même la distribution via des salons d’édition, une vente en ligne et quelques librairies. Nous avons sorti le 5e numéro au début de l’été, TORRENT. Il est aujourd’hui épuisé.
Je passe aussi du temps à parcourir les salons d’édition ( ça reprend ), les librairies, les grottes, des architectures oubliées, les sousterrains et les maisons des ami.e.s. Je co-organise aussi quelques soirées, expositions, évènements quand l’occasion se présente.
Je diffuse aussi une sélection musicale par saison sur DUUU Radio.
En 2020, tu as publié aux éditions Matière Visages du temps,
un recueil contenant des récits élaborés entre 2014 & 2018.
Qu’est-ce que ce livre représente pour toi ?
Considères-tu qu’il offre un bon aperçu de ta production ?
C’est certainement une des meilleures manières de découvrir ce que j’ai fait ces dernières années ! Il contient des récits auto-publiés ou parus dans des revues françaises
ou internationales. Le livre fait presque 300 pages pour 17 récits. Nous avons beaucoup travaillé avec les éditions Matière pour réactualiser les pages déjà parues. J’ai, pour ma part, ajouté de nouvelles pages, revu les textes et colorisé certains récits qui étaient en noir & blanc. J’ai aussi écrit un index relatant des anecdotes ou le contexte lorsqu’il est important ( une résidence en Colombie ou à Rennes par exemple ). J’ai encore pas mal de récits à publier en réserve, mais je suis aussi attaché à l’autopublication. Elle permet une liberté, une autonomie totale ainsi qu’une vitesse de publication inégalable !
Comment est né Visions ?
VISIONS est une commande du festival musical du même nom situé à Plongonvelin, à la pointe de la Bretagne , au-delà de Brest . C’est un événement en avance sur les questions d’écologie, de mixité etc.
Les organisateurs ne voulaient pas produire une énième affiche de festival mais essayer de trouver une autre manière de faire vivre les visuels qu’ils m’avaient commandé. Ils m’ont proposé de faire un zine, sans aucune contrainte, qui ne serait pas le programme, qui ne contiendrait pas le nom des groupes. Aussi, je me suis tout de suite dit que je voulais faire une fiction qui serait l’opposé de l’ambiance d’un tel évènement. Je voulais plutôt évoquer la solitude, le silence. Je me suis concentré sur le lieu du festival ( auquel j’avais déjà assisté quelques années auparavant ) qui est exceptionnel. Il y a derrière la scène, l’océan avec une petite île et son fort. C’est le point
de départ du récit.