À propos de Rêve

J’ai commencé par dessiner avec une plume très fine. Elle permet des variations de traits doux. J’ai dessiné des corps humains dans des boites ; il y a toujours une question de cadrage dans mon travail. Ça faisait longtemps que je n’avais pas dessiné de corps, je trouve ça raté dans la plupart des bandes dessinées d’ailleurs. C’est très dur. Avec cette plume et une encre grise, je trouvais le résultat proche d’une émotion que je voulais retranscrire, que je retrouvais dans «   Le Parc   » de Botho Strauss :
« […] il me semble que nous, nous dormons. Et que quelque chose d’autre est éveillé… »
Et chez plein d’autres. Poe aussi, dont un poème ouvre le livre, sauf que lui on ne sait même pas si quelqu’un veille.
C’est un travail de couleur et de composition. Le procédé d’impression développé par Piergiuseppe Molinar ajoute beaucoup de charme. Les encres offsets habituelles sont remplacées par des fluos. On obtient une quadrichromie spéciale. C’est parfois assez violent, mais il n’y pas de sang. Il y a des tentatives d’élévations, un brouillard discret, un peu d’humour. Tous dorment ou dormiront bientôt, la vie semble un rêve mélancolique et bizarre.
C’est une stase aussi. J’ai appris depuis peu qu’en dessin on peut signifier à la fois le mouvement et l’immobilité dans un seul objet représenté. Ce qui est contradictoire à priori mais qui, peut-être, contient une part réelle de vérité : l’image, une représentation statique, peut dire ce qu’elle est et ce qu’elle veut faire croire. L’immobilité qui désire le transitoire, des représentations qui désirent s’éveiller sans y parvenir totalement et qui tressaillent, ou bien la vie capturée qui se débat encore. Un cœur rouge et qui bat. C’est plus intéressant que de les isoler ou de les assembler en des termes distincts. L’image permet d’envisager un coup double, apparemment impossible.

J’avais préparé une liste que je n’ai pas gardée :

    Sainte-Colombe
        Tombeau les regrets
Charonne
        Showgirls
    Les endormis
            Watteau
        Talion
        Armes Occidentales
( Pascal Quignard )
Le Giorgione
             Que pouvons-nous espérer ?
                              Trèves